Pasolini n’est pas mort. Il vit dans un pavillon à Dallas
lundi 09/01/2006

L’autre jour, saisi par la magie de Noël, qui invite à se gaver de foie gras et à regarder à peu près n’importe quel film qui comporte des sapins, je suis allé voir Esprit de famille. Si, si, vous savez le film où Sarah Jessica Parker essaie de faire croire qu’elle peut jouer autre chose que Sex in the city, simplement en changeant de paire de chaussures.
Or, surprise, c’était plutôt bien. Voir plutôt vraiment pas mal. Esprit de famille raconte un dérèglement familial, ou comment à une famille américaine lambda (ou en tous cas une famille hollywoodienne lambda : riche, blanche, nombreuse, vivant dans les suburbs) se nourrit de la haine qu’elle voue à la nouvelle compagne du fils aîné. Ce simple déplacement, qui consiste à faire de la haine plutôt que de l’amour le moteur de l’unité américaine, outre sa singularité rafraîchissante, ouvre la porte à tous les interdits : adultère, trahisons au sein de la fratrie, discrimination, humiliation, mensonge, expression ouverte de rejet et de dégoût. Esprit de famille, c’est Théorème sans sexe (donc sans libération possible) et où Sarah Jessica Parker remplacerait Terence Stamp. C’est Pasolini en plus kitsch, en plus bitch, en plus cheap. Vendu comme une comédie de Noël à la guimauve, Esprit de famille n’est drôle à aucun moment, mais au contraire provoque un sentiment d’angoisse réellement déstabilisant. Dans sa première heure au moins, puisque, juste avant le dénouement, le sacrifice cathartique de la mère sauvegarde in fine l’unité de la famille, qui se recompose n’importe comment en quatrième vitesse, juste à temps pour le final lacrymal et rédempteur. Ouf, la morale est sauve. Un peu plus et j’aimais vraiment un film avec Sarah Jessica Parker. Vivement la reprise.